La duplicité de la France mise à nu 

«La France a donné Kidal aux séparatistes». En s’exprimant ainsi sur les antennes de RFI à l’aune de la publication de son ouvrage « Le Grand livre de l’Afrique », Nicolas Normand, ancien ambassadeur de France au Mali, jette un grand pavé dans le jardin de son employeur, le gouvernement français. Nicolas Normand s’est offert depuis quelques années une certaine liberté de ton pour critiquer les opérations militaires ou les agissements de son pays au Mali.

En août 2018, il écrivait dans « Le Monde » que « le chaos au Mali résulte d’une succession de faux pas de la diplomatie française ». Déjà en 2016 au cours de la 7ème édition du Marrakech Security Forum, il avait violemment critiqué l’Accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger en ces termes : « Ce pacte accorde une forme de prime à la violence, au profit des rebelles qui ont pris les armes, ce qui engendre des frustrations chez les autres ».

Il est connu de tous que le MNLA, qui avait trouvé refuge à Ouagadougou suite à la déculottée infligée à Gao en juin 2012 par les islamistes du MUJAO, a été transporté dans les bagages de  Serval pour lui offrir la ville de Kidal sur un plateau d’argent. Il est aussi connu de tous que la reconversion des anciens d’Ansardine en Haut Conseil pour l’Unité de l’Azawad (HCUA) a été faite avec l’aval de Paris, par la diplomatie du Burkina Faso, notamment Djibril Bassolé, un homme contre lequel le gouvernement du Mali devrait lancer un mandat d’arrêt international.

Il n’est pas exact de mettre tous les malheurs du Mali sur le dos de la France et de la communauté internationale. Le manque de leadership – clairvoyant et courageux – au sommet de l’Etat malien a ouvert un grand boulevard à la communauté internationale, dont certains représentants n’hésitent plus à se substituer aux institutions légitimes. Comme ce fut le cas, avec la signature en octobre 2018, d’un pacte pour la paix entre le gouvernement du Mali et les Nations Unies.

Tant que la gouvernance malienne sera erratique, le Mali sera à la merci de la France et de la communauté internationale. Quand l’imam Mahmoud Dicko, Président du Haut Conseil Islamique du Mali (HCI) dénonce cette ingérence de la France, il est voué aux gémonies par une élite dirigeante plus soucieuse de réfléchir sur les stratégies visant à avoir des rétro-commissions sur des marchés publics que de construire des argumentaires solides afin de faire face à la communauté des intérêts. Pis, certains représentants de la communauté internationale profitent toujours des grosses erreurs de l’équipe gouvernante.

Le Mali est plus que jamais proche de la partition. Les affrontements intercommunautaires au centre du Mali commencent à reléguer au second plan l’épineuse question de Kidal. Des villages continuent à brûler alors que l’une des missions de la MINUSMA est la protection des populations civiles. Petit à petit, la partition s’installe dans les esprits des citoyens. Le temps se chargera du reste.

Quand des saisonniers de la gabegie se jettent sur les deniers publics comme une meute de loups, la République sera longtemps trimbalée de la sorte. A quand la fin de tout ça ?

Chiaka Doumbia

Le Challenger

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