Aliou Diallo, le faiseur de roi de la politique malienne depuis la surprenante troisième position obtenue lors de la présidentielle de juillet-août, s’est fait discret depuis la proclamation des résultats. Loin du brouhaha des politiciens de carrière, et malgré de nombreuses sollicitations, il conserve une position mesurée, conscient d’être devenu l’un des points d’équilibre de la vie politique malienne.
Il faut dire qu’il n’avait d’autre choix que de rester au-dessus de la mêlée après la fin du premier tour. Comme la plupart des candidats de la plateforme qui contestaient le premier tour, il a pris avec beaucoup de recul le choix de Soumaila Cissé de se lancer seul dans un illusoire second tour qui ne tenait pas compte de la position collective de boycotter ce scrutin. Un choix d’abstinence qui paie aujourd’hui puisqu’il est considéré comme une figure sage et cohérente au sein d’une opposition dont la position laisse les maliens perplexes.
Depuis près d’un mois, le camp du candidat malheureux, Soumaila Cissé, a fini par démystifier sa frange de l’opposition. Après s’être déclaré vainqueurs d’un scrutin qu’ils ne pouvaient pas remporter, la dernière trouvaille est d’appeler à une cotisation populaire pour l’organisation de marches pacifiques qui se succèdent depuis quatre semaines sans résultat palpable.
Malgré les appels du pied des uns et des autres, Aliou Diallo, fort de ses résultats au premier tour de la présidentielle (troisième homme du scrutin avec plus de 8% des voix malgré son statut de candidat indépendant et de novice en politique), a fait le choix de rester au-dessus de la mêlée politicienne. Voix d’une jeunesse à laquelle il a redonné espoir, il a conscience qu’il ne peut pas se perdre en polémiques déjà tranchée par une Cour Constitutionnelle qui, aussi décriée soit-elle, reste la plus haute juridiction nationale. Le Président proclamé élu est par ailleurs félicité à tours de bras par la communauté internationale qui parait plus soulagée par l’issue globalement pacifique du scrutin. Pour le camp d’Aliou Diallo, la bataille collective du premier tour a été gâchée par l’acceptation d’un second tour qui valide automatiquement le résultat du premier tour. Il faut donc se résigner à se tourner vers l’avenir et à consolider la nouvelle voix qu’il a ouverte.
En effet, au-delà même de ses électeurs du 29 juillet, Aliou Diallo représente désormais une voix qui compte dans la politique malienne. La voix de l’espoir et du changement que tant de Maliens appellent de leurs vœux, et qui n’a jamais semblé aussi accessible. La voix de la sagesse et le garant d’une certaine stabilité au Mali.
Contrairement à ses concurrents de la présidentielle, Aliou Diallo n’est pas un professionnel de la politique. Il ne s’est pas engagé par carriérisme ou par opportunisme, mais au nom d’une certaine idée du Mali. « Aliou Diallo est venu pour sortir son pays de l’ornière dans laquelle les politiciens l’ont placé depuis plus de trente ans, en délaissant les besoins profonds de la population au bénéfice d’une petite élite », rappelle un jeune mécanicien de la capitale.
C’est fort de ce message, qui a sous-tendu toute sa campagne, qu’Aliou Diallo aborde déjà l’après-présidentielle. Comment garantir aux Maliens les conditions d’un changement profond qui permette de ramener la paix, de relancer l’économie du pays et de faire baisser massivement le chômage sans être Chef de l’Etat ? Comment tout autant lutter contre le terrorisme dans le nord et le centre du pays sans contrôler l’exécutif ? Pour lui la solution est toute trouver dans une forte présence de son parti, l’ADP-Maliba dans les rangs de l’Assemblée nationale. Officieusement, on évoque déjà la constitution de listes dans les fiefs qui se sont dégagés lors de la présidentielle.
Mais le point fort de la stratégie d’occupation de la scène politique est le combat pour la relecture de la loi électorale afin de renforcer les mécanismes de contrôle des élections. « Si on ne fait pas en sorte de corriger les lacunes constatées lors de la présidentielle, la même chose se produira aux législatives », affirme l’un des proches d’Aliou Diallo. A cet effet, ses équipes travaillent déjà à l’élaboration d’une proposition de loi qui devrait être présentée lors de la rentrée parlementaire à venir.
Source: Figaro Mali